Don Juan
Gloire à qui freine à mort, de peur d'ecrabouiller
Le hérisson perdu, le crapaud fourvoyé!
Et gloire à don Juan, d'avoir un jour souri
A celle à qui les autres n'attachaient aucun prix!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Gloire au flic qui barrait le passage aux autos
Pour laisser traverser les chats de Léautaud!
Et gloire à don Juan d'avoir pris rendez-vous
Avec la délaissée, que l'amour désavoue!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Gloire au premier venu qui passe et qui se tait
Quand la canaille crie “haro sur le baudet”!
Et gloire à don Juan pour ses galants discours
A celle à qui les autres faisaient jamais la cour!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Et gloire à ce curé sauvant son ennemi
Lors du massacre de la Saint-Barthélémy!
Et gloire à don Juan qui couvrit de baisers
La fille que les autres refusaient d'embrasser!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Et gloire à ce soldat qui jeta son fusil
Plutôt que d'achever l'otage à sa merci!
Et gloire à don Juan d'avoir osé trousser
Celle dont le jupon restait toujours baissé!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Gloire à la bonne sœur qui, par temps pas très chaud
Dégela dans sa main le pénis du manchot!
Et gloire à don Juan qui fit reluire un soir
Ce cul déshérité ne sachant que s'asseoir!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Gloire à qui n'ayant pas d'idéal sacro-saint
Se borne à ne pas trop emmerder ses voisins!
Et gloire à don Juan qui rendit femme celle
Qui, sans lui, quelle horreur, serait morte pucelle!
Cette fille est trop vilaine, il me la faut.
Don Juan
¡Gloria al que frena en seco, para no aplastar
Al erizo perdido, al sapo extraviado!
¡Y gloria a don Juan, por haber sonreído un día
A la que los demás no concedían ninguna importancia!.
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
¡Gloria al policía que frena el paso a los coches
para dejar pasar a los gatos de Léataud (1)!
¡Y Gloria a don Juan por haberse citado
con la abandonada, a la que se le niega el amor!
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
¡Gloria a ese que pasa y que se calla
cuando la canalla grita “¡aplastemos al débil!”
¡Y Gloria a don Juan por sus galantes discursos
a la que los otros nunca hacen la corte!
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
¡Y gloria a ese cura que salva a su enemigo
en la masacre de San Bartolomé (2)!
¡Y gloria a don Juan que cubrió de besos
a la chicas que los otros no querían besar!
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
¡Y gloria a ese soldado que tiró su fusil
antes que matar al rehén a su voluntad!
¡Y gloria a don Juan por haber remangado
la falda a la que siempre la tenía bajada!
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
¡Gloria a la monja que, cuando hace mucho frío,
descongela en su mano el pene del manco!
¡Y gloria a don Juan que hizo relucir una noche
el culo desheredado que no sabía más que sentarse!
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
¡Gloria al que no teniendo un ideal sacrosanto
se limita a no molestar demasiado a sus vecinos!
¡Y gloria a don Juan que hizo mujer a la que,
sin él, ¡qué horror!, hubiese muerto virgen!.
Esta chica es muy vulgar, la quiero para mí.
(1) Paul Léautaud (1872-1956): Escritor francés que reflejó en sus obras su amor hacia los gatos.
(2) Noche de San Bartolomé: Matanza de 20 mil hugonotes en Francia, el 24-08-1572.